(Publié en anglais sous le titre « RACE, SCIENCE AND SOCIETY ») Des anthropologues, des ethnographes, des sociologues, des biologistes apportent la contribution de leurs disciplines à la question raciale, et soumettent à une analyse serrée les arguments de la cause adverse tout en examinant la nature du préjugé racial et des mythes qui l’alimentent. La science et l’histoire n’étant pas stationnaires, la recherche a progressé en une vingtaine d’années, et les perspectives se sont modifiées. Les opinions exprimées, certaines ayant évolué d’une édition à l’autre (1960/1973), s’insèrent donc dans un débat permanent sur la race, le racisme et la discrimination raciale.
L’un des auteurs les plus prestigieux, Claude Lévi-Strauss, fut invité par l’UNESCO dès 1950 à participer à une réunion d’experts internationaux à l’élaboration de la première « Déclaration sur la race ». Les textes demandés par l’UNESCO en 1952 (« Race et histoire ») et 1971 (« Race et culture ») ont été regroupés en un seul article qui figure dans le présent ouvrage. Ils mettent l’accent sur l’apport des différentes cultures, qui ont toutes la même dignité, au progrès de l’humanité. Dans une interview de 2008, il rappellera combien la promotion de la diversité culturelle et notamment du patrimoine culturel immatériel est une étape significative dans les activités de l’UNESCO.
A partir des quatre déclarations sur la discrimination raciale mises au point par les réunions d’experts précitées, l’UNESCO élaborera dès 1975 une Déclaration sur la race et les préjugés raciaux qui sera adoptée par la 20e session de la Conférence générale en 1978. L’Article Premier, alinéa 2, consacrera « le droit à la différence » dans les termes suivants :
Tous les individus et tous les groupes ont le droit d'être différents, de se concevoir et d'être perçus comme tels. Toutefois, la diversité des formes de vie et le droit à la différence ne peuvent en aucun cas servir de prétexte aux préjugés raciaux; ils ne peuvent légitimer ni en droit ni en fait quelque pratique discriminatoire que ce soit, ni fonder la politique de l'apartheid qui constitue la forme extrême du racisme.
Bien qu’il ne s’agisse pas d’un instrument contraignant, la résolution de « Mise en œuvre de la Déclaration sur la race et les préjugés raciaux » (20 C/Rés. 3/1.1/3) invitera les Etats membres à communiquer tous les deux ans (périodicité par la suite portée à quatre ans) un rapport à l’UNESCO, sur les mesures prises pour donner suite aux dispositions de la Déclaration. Un rapport complet sera présenté par le Directeur général pour examen aux Conférences générales successives de l’Organisation.
Monique Couratier et Georges Kutukdjian
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RACISM BEFORE SCIENCE (UNESCO / Gallimard, 1960, reed. 1973)
(Published in French under the title "RACE, SCIENCE AND SOCIETY")
Anthropologists, ethnographers, sociologists, biologists bring the contribution of their disciplines to the racial question, and submit to a close analysis the arguments of the opposing party while examining the nature of racial prejudice and the myths that fuel it. Science and history not being standstill, research has progressed in twenty years, and the outlook has changed. The opinions expressed, some of which have evolved from one edition to the next (1960/1973), are therefore part of an ongoing debate on race, racism and racial discrimination.
One of the most prestigious authors, Claude Lévi-Strauss, was invited by UNESCO in 1950 to participate in a meeting of international experts to draft the first "Declaration on Race". The texts requested by UNESCO in 1952 ("Race and history") and in 1971 ("Race and culture") have been combined into a single article which appears in this book. They emphasize the contribution of different cultures, all of which have the same dignity, to the progress of humanity. In a 2008 interview, he will recall how much the promotion of cultural diversity and in particular of the intangible cultural heritage is a significant step in UNESCO's activities.
On the basis of the four declarations on racial discrimination, finalized by the aforementioned expert meetings, UNESCO will, in 1975, draw up a Declaration on race and racial prejudice which will be adopted by the 20th session of the General Conference in 1978. Article 1, paragraph 2, will enshrine "the right to be different" in the following terms:All individuals and groups have the right to be different, to see themselves and to be seen as such. However, the diversity of forms of life and the right to be different can in no way serve as a pretext for racial prejudice; they cannot legitimize, in law or in fact, any discriminatory practice whatsoever, or found the policy of apartheid which constitutes the extreme form of racism.Although a declaration is not a binding instrument, the resolution for the “Implementation of the Declaration on Race and Racial Prejudice” (20 C/Res. 3/1.1/3) will invite Member States to communicate every two years (periodicity subsequently increased to four years) a report to UNESCO on the measures taken to give effect to the provisions of the Declaration. A full report is presented by the Director-General for consideration at successive General Conferences of the Organization.
Monique Couratier & Georges Kutukdjian